Laos, le sprint final


Nambak-Muang Ngoi

23 km

marchéAvant de démarrer la journée, nous passons ravitailler au marché du village. En cette heure matinale il grouille de monde et les étals sont bien plus appétissants que ce que nous avions vu jusqu’à présent. En fait, il semblerait que les marchés fonctionnent surtout tôt le matin, entre 5h et 7h, après quoi de nombreux vendeurs replis leur étal et filent travailler dans les champs.

Pour rejoindre Muang Ngoi, la route serpente le long de la rivière Nam Ou et vallonne gentiment. Les 23 kilomètres que nous n’avons pas pu faire hier sont vite avalés et nous arrivons bien à l’heure pour pouvoir attraper la barque de 11h qui reste aujourd’hui encore le seul moyen de rallier le village de Muang Ngoi. Les horaires ne sont pas aussi pointilleux qu’en Nouvelle Zélande et nous finissons par démarrer vers 12h pour une heure de remontée de rivière à travers quelques petits rapides pas bien méchants. Entassés à l’arrière sans place pour les jambes nous sommes bien content que la traversée ne soit pas plus longue.

Une fois débarqués, nous nous élançons sur les petits chemins pour aller à la rencontre de ces villages laotiens. Nous marchons à travers les rizières asséchées surplombées de falaises de karst impressionnantes. Le coin est très charmant. Au fin fond du LaosIci il n’y a pas beaucoup de véhicules motorisés, quelques scooter à peine. Il y a quelques grottes dans les falaises de karst. La plupart on trouvé une grande utilité lors des guerres d’Indochine pour se protéger des bombardements.

Les villages sont de véritables cartes postales. Les habitants profitent de la baisse d’activité de la saison sèche pour réparer les maisons, fabriquer du fil et tisser les sarongs, en un mot, faire toutes les petites activités qui passent au second plan pendant les périodes de cultures. Une grande ribambelle de gamins jouent un peu partout. Nous en croisons un groupe particulièrement occupé à pêcher au harpon dans une rivière. Hormis quelques détails de modernité, ces petits villages semblent véritablement hors du temps. Tout est fait à la main, les vêtements, les habitations, les outils.

En fin de journée, nous retournons dans le premier village traversée pour trouver un endroit où dormir. La première guest house envisagée étant pleine, nous nous rabattons sur la seconde. Le propriétaire sympathique explique à Sébastien quelques techniques d’utilisation du bambou puis nous passons à la salle de bain commune du village, la rivière, que tous partagent y compris les canards et les buffles. Notre présence et nos ablutions font sourire quelques personnes. Nous passons ensuite à table pour une soupe de bambou et des nouilles de riz aux légumes assez goûtus.

Nam Ou

Louang Prabang

Craquage croissantNous rallions la ville de Louang Prabang à moitié en bateau, à moitié en vélo et finissons le trajet de nuit. Nous arrivons dans une ville à l’ambiance sympathique. Des petites lumières donne aux ruelles une atmosphère tamisée qui correspond bien avec la vie nocturne tranquille des lieux. Contrairement au reste du Laos qui a tendance à se coucher avec le soleil, Louang Prabang veille un peu plus tard, tout en restant raisonnable. Cette ancienne capitale du pays au style architectural colonial français conservé et restauré est tout à fait charmante de jour aussi. Les nouvelles constructions ont suivi la tendance et le tout apporte une cohérence et un rendu bien réussi. Les traces du passage français sont nombreuses, comme toutes ces boulangeries pâtisseries et les cafés. Nous ne résistons pas longtemps à l’appel des croissants et du chausson aux pommes.

Beaucoup de temples anciens ont été épargnés de la guerre. Au style très décoré mais plus sobre que les temples thaïlandais avec beaucoup de bois, ils abritent une population monastique importante. Nous n’avions pas croisé beaucoup de moines jusqu’à présent dans le pays. TempleIci, ils sont partout. La ville est classée au patrimoine mondial de l’UNESCO, résultat pas de véhicule motorisé dans le centre, ce qui la rend très calme et sympathique pour se balader à pied ou en vélo. Nous prenons un grand plaisir à faire une petite pause de vélo et à nous y balader à pied.

Un après-midi nous partons faire la visite du Palais royal et du mont XX qui lui fait face et donne une belle vue panoramique sur la ville. Et le soir venu, nous montons dans le bus de nuit vers Vientiane pour aller faire nos visas chinois sur la journée avec retour le soir même par un autre bus de nuit. Le programme est chargé, mais nous préférons passer plus de temps dans les parages que d’attendre les visas à Vientiane. Les vélos eux restent à Luang Prabang.

Luang Prabang – Khew Kacham

86,5km +1980m, -900m

Montée interminablePremier jour démarrage tardif mais en forme après un croissant et un café. Les bus de nuit ont finalement été suffisamment confortables et nous avons réussi à dormir quelques précieuses heures. Plusieurs endroits pour dormir en vue, le premier desquels se trouve vers 80 kilomètres après 2 grosses montées. Le lonely planet s’est récemment mis à décrire des routes pour son lectorat cycliste et cette portion à droit à un petit encart qui dit à peu près ceci : “De Luang Prabang à Vang Vien, Khew Kacham dispose d’un marché et de 3 guest houses basiques offrant une possibilité d’étape pour les cyclistes au bout de 5 heures de pédalage”. Après cette lecture nous nous disons que nous nous poserons sans doute dans la ville d’après, mais très vite il devient clair que Khew Kacham sera déjà une grosse étape à elle toute seule. En plus, il n’y a rien avant hormis quelques petits villages laos qui n’ont rien de prévu pour les cyclistes de passage, pas même un restaurant. En guise de ballade de 5h, ce sont 86 kilomètres et pas loin de 2000m de dénivelé qu’il faut affronter et deux fois. Deux interminables montées pour lesquelles nous mettons 7h30 de pédalage sans compter les pauses pour rallier le village après le coucher de soleil, éreintés.

Khew Kacham – Pha Chao

122km, +1630m, -2600m

Les montagnes au loinCette fois nous jetons un regard plus précis sur la route du jour. Après la surprise d’hier, nous souhaitons savoir un peu mieux ce qui nous attend. La route que nous allons faire dispose d’un diagramme de dénivelé sur notre carte. Une première descente, une belle montée relativement courte, puis une autre descente qui remonte dans la foulée plus gentiment puis enfin une belle descente ponctuée de deux petites bosses qui semblent inoffensives. Voilà un programme qui nous plaît. Nous passerons de 1400m à 400m d’altitude. Parfait ! … En tout cas en théorie. En pratique, les belles descentes sont tellement raides qu’elles sont vite avalée. Les petites remontées, elles, ne se passent pas aussi facilement. Nous ne voyons jamais arriver cette fameuse descente finale qui paraissait si prometteuse. Alors que nous pensions descendre, nous nous retrouvons à monter tout de même 1600m, ce qui place cette journée de descente parmi nos plus grosses journées de montée, un comble ! Le moral en prend un joli coup.

Nous finissons tout de même par rejoindre cette fameuse descente et filons tranquillement sur la route. Nous passons la ville de Kasy qui regorge de guest houses et d’hôtels mais il est encore trop tôt pour s’arrêter. A la sortie de la ville nous voyons encore une guest house tous les kilomètres et filons confiants. Bien entendu, lorsque nous commençons à songer à notre arrêt, plus de possibilités de logement. La loi de Murphy est dure, mais c’est la Loi. Fatigués après 120 kilomètres nous faisons une ultime pause fruits pour décider si nous posons la tente ou si nous poussons coûte que coûte jusqu’au prochain village. Il y a quand même un raidillon de 200m à franchir et nos mollets menacent de faire grève. C’est alors que débarque un jeune lao. “Do you want to sleep in my home ?” Un bref regard entre nous et l’affaire est entendue. Nous nous faisions justement la réflexion qu’il était plus aisé de demander l’hospitalité au Cambodge qu’au Laos et voilà qu’elle nous est offerte spontanément.

Devinez qui se farcit le béton !Nous rebroussons donc chemin de quelques centaines de mètres pour rejoindre le village de Pha Chao et la maison de notre hôte. Quelques jeunes hommes du village viennent de se mettre au cours d’anglais au lycée et cherchent des touristes étrangers pour pratiquer en les invitant à passer la nuit. Une initiative sympathique et qui ne pouvait pas tomber plus à point ce soir. Alors que la nuit commence déjà à tomber, nous sommes invités à passer à la salle de bain, un tuyau relié directement à la rivière et qui dessert le centre du village qu’y s’y retrouver pour les ablutions quotidiennes. Chacun se savonne copieusement sur le côté en attendant son tour pour passer au rinçage. La température de l’eau est juste ce qu’il faut pour ne pas risquer d’embouteillage. Nous retournons ensuite pour passer à table, suivi par une bonne moitié du village assez curieux de voir les derniers invités. Tour à tour les jeunes nous posent des questions. Ce sont souvent les mêmes d’une personne à l’autre, mais nous sentons que leur envie de pratiquer est réelle et nous nous prêtons volontiers au jeu. Ils sont d’ethnie Kamu et nous apprennent aussi quelques mots dans leur langue au passage.

La maison est simple et assez dénuée de confort. La télé est peut être bien le seul appareil électrique du logis. La cuisine nous rappelle le Pérou et la Bolivie. C’est une pièce séparée, toute simple. En guise de four, un feu au centre et un jeu de marmite pour cuire le riz, le poisson et les légumes, mais surtout le riz. C’est vraiment l’aliment principal. Du riz le matin, le midi, au goûter et le soir et un peu d’accompagnement. Ici ils le préfèrent “khao gnao”, sticky rice et sont tout étonnés de voir que nous l’apprécions aussi de la sorte. Après 122 kilomètres, même Laetitia apprécie le riz, sous n’importe quelle forme.

Les charmants KamusQuand vient le moment de dormir, on nous regarde un peu gêné, puis le jeune homme le plus agile en anglais nous dit que nous ne pourrons pas dormir ensemble cette nuit. Les croyances du village indiquent que les esprits des ancêtres continuent d’habiter la maison familiale et il ne faut pas les offenser en dormant ensemble. Laetitia a donc sa couche personnelle et Sébastien partage un bout de chambrée avec les garçons de la famille. Il est vrai que nous n’avions pas vu beaucoup d’hommes dans les parages de la maison, vivent-ils séparés ? Le nombre impressionnant de marmots nous fait dire qu’ils doivent quand même arriver à se trouver du temps en commun.

Pha Chao – Nam Lik

134 km, +600m, -800m

Sticky riceNous quittons ces charmants Kamus alors qu’ils enfourchent leurs vélos pour aller en cours et prenons la direction de Vang Vieng. Au passage du fameux raidillon nous sommes bien contents de ne pas avoir eu à le grimper la veille. Il n’est pas si affreux ce matin avec les jambes fraîches, mais hier, il aurait était fatal. Au sommet nous nous retrouvons face à une belle vallée toute plate qui s’étend à perte de vue. “Perte de vue” n’est pas si long que ça dans ces contrées enfumées, mais ça fait toujours du bien au moral.

La ville de Viang Vieng est connue comme la ville de la fête au Laos. Des hordes de backpackers s’y retrouvent pour faire la fête dans les seuls bars Laos qui ferment au delà de minuit. Nous arrivons vers 10h30 dans une ville qui est donc plutôt calme. Viang Vieng n’a pas particulièrement de charme en elle même. Des rangées de restaurants affichent tous la même liste impressionnante de plats italiens, français, anglais, américains, espagnols et une ou deux spécialités du Laos. La campagne autour est par contre très jolie. Les reliefs de Karst abruptes s’élèvent de rizières qui s’étalent dans tous les fonds de vallée pour former un paysage très plaisant.

Après Viang Vieng, la route 13 jusque là potable devient de plus en plus désagréable. Déjà, le trafic assez intense de bus et de camions suffit à lui tout seul à nous rebuter. Pour parfaire le tableau, les équipes en charge du maintient de la route sont régulièrement affairées à démonter le peu de bitume sain à coup de pelleteuse pour le remplacer par un champ de cailloux et de poussière. L’objectif à terme est de refaire la route, mais pour l’instant ils ne semblent avoir le budget que pour la défaire. Nous nous retrouvons à nouveaux dans une poussière intense et sentons à nouveau ces sensations de gorge et de nez pris.

Poussière70 kilomètres nous séparent de la jonction avec la route 10 qui devrait nous permettre d’éviter le reste de ce cauchemar jusqu’à Vientiane. Ce qu’ils sont longs ces kilomètres. Heureusement la route est plutôt plate et nous pouvons dérouler un peu. Mais pousser sur les pédales implique de gober de plus grandes quantités de cet fumée rouge et nous ne souhaitons pas que nos poumons se recouvrent à la manière de toutes ces plantes que nous voyons au bord de la route.

Au kilomètre 80 tant espéré, c’est la délivrance. Nous sortons enfin de cette route 13 en direction d’un village où nous devrions pouvoir dormir. D’entrée quelques grands sourires nous accueillent et tout va mieux. Nous arrivons à destination avec les dernières lueurs de la journée, un éco-village en bord de rivière avec un bungalow, une douche chaude et une petite BeerLao pour nous remettre de tant d’émotion.

Nam Lik – Vientiane

134 km

10 000 kmsLa nuit fût calme, sans coq, sans effervescence matinale … Du coup nous nous levons tranquillement sur le coup de 6h15 ! Forcément les mauvaises habitudes se prennent vite. En même temps ce n’est pas plus mal. Nous avons une centaine de kilomètres à faire pour rejoindre Vientiane où nous aimerions arriver suffisamment tôt pour récupérer nos passeport fraîchement dotés de visas chinois. Nous partons à travers la campagne lao vallonnée sur des chemins de terre rouge qui passent de petits villages qui nous font un peu penser à la Thaïlande avec leurs maisons en dur, les nombreuses échoppes et des jardins entretenus. Nous pensions rejoindre rapidement Thalat, mais il nous faut finalement plus de 3à kilomètres pour y parvenir. Cette journée serait-elle plus coriace que nous ne l’avions envisagée ?

Après être passé de l’autre côté de la rivière nos doutes se trouvent confirmés. Quelques beaux monts nous font face et la route passe clairement à travers. Heureusement ils ne sont pas nombreux et nous retournons vite dans la vallée au milieu des rizières. Nous suivons la route n°10, bien plus sympathique que la n°13. Les pelleteuses ne sont pas encore venues labourer le bitume et nous pouvons donc relever un peu le nez de la route pour profiter de la vue.

L’heure tourne et nous poussons tout ce que nous pouvons pour arriver dans les temps. Un panneau en bord de route nous confirme la petite erreur d’estimation, ça sera plutôt autour de 130 kilomètres. Au fur et à mesure que nous approchons de la capitale, la circulation se densifie. Au loin nous apercevons finalement quelques monuments connus. Il est 15h30, peut être que l’ambassade est encore ouverte ? Ce serait quasiment inespéré pour une ambassade, mais nous tentons notre chance quand même et arrivons devant une porte métallique pratiquement fermée. Derrière, la salle des visas est déserte mais une tête dépasse tout de même du comptoir. À notre grande surprise nous ne sommes pas refoulés et on nous donne même les passeports !

VientianeNous passons ensuite au service médical de l’ambassade de France pour quelques informations et ressortons avec un des rappels de vaccins que nous avions à faire ainsi qu’une pesée de curiosité. La balance indique 62 kg pour Sébastien, le poids de ses 20 ans. Nous finissons la journée par un passage au Night Market où la faim tenace que nous refoulons depuis quelques heures maintenant nous fait totalement craquer face à toutes ces bonnes choses que nous voyons. Après cette grosse journée de vélo, notre appétit vorace nous guide d’échoppe en échoppe. Après ce copieux banquet, nous retournons à l’hôtel le ventre aussi tendu que notre sourire.

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9 responses to “Laos, le sprint final”

  1. Quelle joie de vous voir si heureux, si en joie.
    Merveilleux voyage à vous.
    Moi qui avait peur pour votre équilibre alimentaire, je vois que vos estomacs sont au paradis des gourmands.
    Avec tous vos efforts je suis heureuse pour vos visas et bravo pour le maintien de votre ligne.
    Je vous embrasse
    chloé

  2. c’est toujours un vrai bonheur de vous suivre et maintenant…..en route pour la chine!!! bisous – yvonne

    • Mais non, on fera toujours autant ! Au pas de course. Tu verras on s’y fait à passer 12h sur le vélo 😉

  3. 10000 km , c’est bien ça? et combien au total? c’est dément !!! Bravo et bonne continuation . Vous allez bientôt avoir du renfort Bisous Pépé et mamie

    • 10000 kilomètres, c’est bien ça 🙂 Un peu plus même maintenant. Au final on devrait flirter avec les 15000. On verra bien, il n’y a pas d’objectif particulier

  4. prenez bien soin de maman, elle panique un peu…. et je la comprends !!!! bisous

  5. Enorme séparation entre vous deux pour dormir, !!!!
    En tout cas Félicitations pour les 10 000km. On a du mal à imaginer !!