Le Laos, un pays vallonné


Direction le Laos

70 km

métier à tisserNous quittons la Thaïlande par une petite barque qui nous emmène de l’autre côté du Mékong au poste frontière de Huai Xai. Une belle pagaille règne pour faire les visas et la procédure nous retient un petit moment. Il est déjà 11h quand nous arrivons finalement à décoller. Laetitia a regardé dans le guide et annonce la prochaine étape à 87 km. Si le Laos est aussi vallonné que ce qu’on dit ce sera déjà une belle prouesse. En réalité la ville se trouve au kilomètre 87 sur la route et nous sommes actuellement au kilomètre 198 … Là ça devient carrément mission impossible. D’autant que le Laos est bel et bien aussi vallonné que ce qu’on en dit. Après une belle portion de faux plat descendant, la première côte nous cueille à froid. 10% de montée qui n’en finisse pas. Dans ces montées raides nous peinons à 5 km.h alors que dans les descentes qui suivent nous filons aisément au delà de 40. Du coup nous avons l’impression de ne faire que monter.

Village LaoEn terme de paysage, le Laos est un peu différent de la Thaïlande. Tout d’abord les Laos ont réussi à conserver une belle partie de leurs forêts. De beaux arbres s’élancent majestueusement vers le ciel, ce que nous n’avions pas vu souvent depuis Phnom Penh. Le pays est assez vert du coup. Ce qui frappe assez vite aussi c’est la plus grande pauvreté du pays. Les étals des marchés sont bien moins fournis et les gens sont moins bien habillés. Dans les petits villages que nous croisons, les maisons sont faites en paille, bambou et bois et non en brique et nous voyons beaucoup moins de voitures sur les routes. Mais assez étonnamment, le coût de la vie est un peu plus élevé qu’en Thaïlande.

Après avoir laissé une bonne partie de notre énergie dans les côtes où les camions n’avançaient guère plus vite que nous, nous arrivons dans le village de Don Chai qui possède une guest house. Ici, chaque maison abrite un métier à tisser sur lequel un tissu est bien souvent en cours d’élaboration. Le temple du village est à l’image de la plupart des temples laos, simple dans sa décoration et un peu vieillot. Il aurait bien besoin d’un rafraîchissement. Ces petits villages ont peu de maisons et d’habitants. Ils ont un côté très charmants au milieu de leurs rizières.

Don Chai – Louang Namtha

120 km

Graines à battreLa journée commence gentiment. 5 kilomètres de plat le long des rizières nous permettent de chauffer les jambes doucement en prévision de ce qui nous attend. Ensuite, les choses sérieuses redémarrent. À l’image de la veille la route est très sportive. Ça monte et ça descend dans des pentes d’une dizaine de degrés. Au bord de la route, nous voyons de nombreuses personnes battre des tiges pleines de graines sur le pavé. Le but de la manœuvre est de vider les graines pour ne conserver que les tiges. Nous nous demandons bien ce qu’ils en font par la suite. C’est très souvent les femmes qui sont au turbin. Elles battent les tiges au bord des routes, elles s’occupent des enfants, elles tissent et ce à tout âge. Les petites sont très souvent bien occupées alors même que les petits gars ne sont pas loin à jouer au foot. Laeti bouillonne sur sa selle. Dans la culture Lao, les femmes sont inférieures aux hommes et devront forcément se réincarner en homme avant d’accéder au nirvana. Les hommes eux ont du temps pour “méditer” justement pour cela. En pratique, ils méditent surtout autour d’une BeerLao ou d’un combat de coqs.

RizièresNous arrivons à Vieng Phuka pour la pause déjeuner. Nous passons quelques restaurants déserts et décidons d’aller voir au marché ce qu’il y a de bon. Quelques étals proposent de maigres fruits et légumes et un propose des soupes de nouilles. Nous sommes bien loin des marchés thaïs qui nous donnaient si faim. Nous avions prévu de prendre par les montagnes pour rejoindre Louang Namtha 2 jours plus tard, mais de nombreuses personnes nous le déconseillent fortement. La route a été construite il y a 8 ans, mais personne n’est là pour s’en occuper. Du coup elle serait devenue infranchissable. Sont-ils vraiment aller voir la route ? Nous doutons beaucoup et finissons par suivre leurs conseils tout de même.

La route qui mène à Louang Namtha est beaucoup plus calme. Elle nous mène à travers quelques passages dans une forêt dense et belle d’une zone protégée. Au final nous aurons parcouru 120 kilomètres sur la journée. Une belle performance. La ville de Louang Namtha est toute poussiéreuse et en travaux. Nous nous étions habitués aux villes Thaïs relativement propres. Nous trouvons un hôtel et filons refaire le plein de calories au marché nocturne. De retour à l’hôtel nous prenons une bonne douche gelée un peu rude et nous retournons au marché nocturne pour un deuxième service, le premier n’ayant pas été suffisant pour rassasier nos appétits féroces.

Muang Sing

Transport de pastèquesPour rallier les 60 kilomètres qui nous séparent de Muang Sing nous prenons le bus collectif. D’apparence correcte, nous ressentons vite le grand âge du bolide lorsqu’il se met à remuer à la moindre bosse sur la route. Clairement, les amortisseurs ont fait leur temps et depuis un bon moment. Nous sommes secoués sur tout le trajet et cela s’empire au fur et à mesure que nous avançons, nous donnant bien envie de faire le trajet de retour en vélo malgré la côte impressionnante de 20 kilomètres. A bord, les locaux ne sont pas au mieux non plus. Seul le chauffeur semble à son aise. Nous descendons au niveau de la gare routière. La ville est en triste état. Sale, poussiéreuse et assez délabrée par endroit, nous n’avions pas vu ça depuis la Bolivie.

Nous prenons une carte du coin et partons en ballade. Première étape, la frontière chinoise à 12 kilomètres. Nous ne pouvons pas passer par manque de visa et aussi par interdit, mais nous voulions tout de même voir un premier bout de chine avant d’y aller d’ici un mois. Le long de la route de nombreux camions immatriculés en chine sont en cours de chargement de pastèques. Une fourmilière de petites mains s’active dans les champs pour ramener de quoi remplir les mastodontes qui reviendront sans doute un peu plus tard quand les bananes seront prêtes. Nous prenons un petit sentier pour nous enfoncer un peu plus dans la campagne vers les villages. L’asphalte s’arrête net et laisse la place à du chemin de terre et de pierres.

Les villages sont simples mais charmants. Faits principalement de maisons en bambou et en bois, il y en a de temps en temps une en brique. Certaines personnes nous sourient, d’autres nous dévisagent un peu plus durement. Dans l’ensemble l’accueil est plutôt bon. En passant à notre hauteur une grand mère chargée comme un baudet nous offre une des pastèques qu’elle transporte. Le paysage est fait de forêts et de cultures dans lesquelles une multitudes de chemins partent dans tous les sens. Nous suivons les principaux pour aller de village en village. Quelques mots et de grands gestes nous servent à demander la route. Nous avons quelques doutes parfois quand nous semblons loin de tout et puis des maisons réapparaissent et nous ne sommes plus si perdus.

Après quelques vagabondages nous sommes de retour sur un axe principal, une route en terre un peu mieux carrossable que d’autres. Nous cherchons à couper de nouveau à travers champs mais systématiquement les locaux nous disent que ce n’est pas possible là, qu’il faut essayer plus loin. Nous nous retrouvons au final à longer cette route assez passante dans de grande nuées de poussières à chaque passage de camion sur de nombreux kilomètres. A chaque fois les routes que nous voyons sur notre carte sont déconseillées par les gens. Pas de route, pas de route. A force d’insistance on finit souvent par nous dire qu’il y a bien des chemins, mais que nous n’arriverons pas à trouver le bon. Nous rebroussons alors chemin et espérons ne pas croiser de monde à notre prochaine tentative, mais en vain. Nous reprenons alors cette route et ravalons les kilomètres et la poussière avec pour retrouver la ville.

Combat de coqsAprès toutes ces soupes de nouilles, nous voulons autre chose ce soir. Ça tombe bien, la forte communauté chinoise de la ville à carrément ramener un restaurant chinois, un vrai de vrai avec un chef chinois à la manœuvre. Nous sommes plus que tentés par cette opportunité. Arrivés dans le restaurant on nous dit que le menu n’est qu’en chinois. Qu’à cela ne tienne ! Qu’ici on ne parle pas anglais. Pas de soucis non plus ! Ils ne semblent pas trop prêts à se donner la peine de comprendre ce que nous voulons. Nous voyons passer tous ces plats alléchants et décidons de leur forcer un peu la main tout de même. Au final un premier plat nous est servi. Ce sont des tripes. Le goût fort et la texture sont caractéristiques. Laetitia n’est pas des plus heureuses. Un 2e plat arrive, une assiette de tofu en sauce au gingembre. Pas mauvais, mais bon, du tofu au tofu … ça fait beaucoup de tofu au final. Un saladier de riz est amené en accompagnement pendant que Sébastien passe en cuisine pour demander un plat de légumes “no chili !!” Les assiettes de clients chinois tout autour de nous sont rouges de piments et sans aucun doute immangeables pour nous. Les légumes arrivent enfin. Nous voilà donc attablés devant 3 plats, tous ramenés en double et accompagnés d’un saladier de riz. Une montagne de nourriture que nous n’arrivons pas à conquérir entièrement. De toute façon, le riz est servi pour qu’il n’y ait pas de manque, il est prévu qu’il en reste. Les chinois sortent de table en laissant une bonne partie dans les plats. Nous repartons vers l’hôtel avec l’estomac dilaté, mais heureux d’avoir mangé différemment et très bon. Pourvu que la Chine soit aussi plaisante à chaque fois !

Muang Sing – Vieng Leuv

100 km

PêcheC’est donc en vélo que nous repartons vers Louang Namtha. La route démarre tranquillement par un faux-plat et se met à monter progressivement. Au final ce n’est pas si affreux que ce que nous avions imaginé depuis le bus, d’autant plus que nous roulons légers, nos sacoches étant restées à Luang Namtha. Le long de la route nous croisons quelques villages installés au bord de la zone de nature protégée. Les villageois profitent de cette belle forêt dense pour aller chasser tout ce qui traîne. Nous croisons de nombreux garçons armés d’arbalètes en bambou ou de harpon pour la pêche. Certains plus grands garçons se baladent avec des fusils et nous en voyons même un avec une Kalachnikov … pas toujours très rassurant tout ça. Peu reviennent avec du gibier, même si nous voyons un singe au bout d’une corde et un autre animal inconnu au bataillon qui crache tout ce qu’il peut en se débattant lui aussi au bout de sa laisse.

Nous avions mis 2h pour faire l’aller en bus, nous n’en mettrons que 2 de plus pour faire le retour en vélo. Une ballade bien plus plaisante au final. De retour en ville nous cherchons longuement un restaurant qui veuillent bien nous servir autre chose qu’une soupe de nouille. Puis au moment de reprendre la route, nous croisons 2 autres cyclistes qui nous comptent leurs malheurs avec la frontière chinoise. Alors que leurs passeports étaient tamponnés, que tous les papiers avaient été faits, ils s’apprêtaient à prendre la direction de Kunming lorsqu’un dernier fonctionnaire chinois est apparu et à décrété que les vélos ne pouvaient pas rentrer en Chine. Il est rarement aisé de négocier avec un policier à la frontière d’un pays, mais avec un policier chinois sans maîtriser la langue, la tâche est tout bonnement impossible. Les voila donc revenus au Laos prêts à retenter un ultime passage de la frontière, en bus cette fois.

Village LaoNous leur souhaitons bonne chance et remettons le cap à l’Est sur une route facile. Nous prenons donc notre temps et profitons des quelques occasions qui s’offrent à nous d’observer les Laos à l’œuvre. Ici des femmes sont les pieds dans l’eau, un filet à la main à pêcher, là des hommes sont occupés à bâtir une maison. Ces Laos n’ont pas une réputation d’acharnés du travail, mais finalement il y a quand même pas mal d’activité un peu partout. Nous finissons à Vieng Leuv, dernière ville avant la frontière chinoise de Boten où nous trouvons une guest house que 3 autres cyclistes avaient déjà repéré avant nous. Alors que nous discutons des intentions des uns et des autres, ils nous annoncent leur projet de passer en Chine demain et nous leurs racontons les mésaventures du couple de Luang Namtha. Eux aussi décident alors de passer en bus. Apparemment Mars serait un mois de tension en Chine au sujet du Tibet, ce qui pourrait donc être à l’origine des difficultés de passage en vélo. Nous espérons vivement que tous arriverons à passer de l’autre côté demain.

Vieng Leuv – Oudom Xai

Il y a des jours qui ressemblent tellement aux autres que nous hésitons à vous en parler. Est-il vraiment intéressant de vous dire que nous avons pédalé sur une route qui montait et redescendait comme la veille, qui était bordée de villages en bambou comme la veille ou bien que nous avons encore eu une belle dose de sourires, comme la veille ? Des jours comme ceux là nous devons aller chercher un peu plus pour avoir des choses à dire. C’est précisément dans ce but, et bien entendu uniquement dans ce but, que nous sommes allés à la Lao Red Cross d’Oudom Xai. Après y avoir relaxé nos muscles lors d’un petit sauna d’une demi-heure entrecoupé de pauses thé pour éviter la surchauffe, nous nous sommes allongés une petite heure pendant que des mains agiles s’occupaient à nous masser le dos, les jambes, le cou et les épaules. Un massage Lao est un peu comme un massage Thaï, puissant et vivifiant. Le but n’est pas de détendre en surface mais en profondeur, dans la chair. Pour 3 euros par personne, nous n’avons pas su résister bien longtemps.

Oudom Xai – Nambak

94 km, +1100m, -1300m

La route 13Après des kilomètres d’asphalte flambant neuf, l’arrivée sur la route 13 entre Oudom Xai et Luang Prabang opère comme un choc. D’entrée la couleur est donnée : la route est en très mauvais état. D’énormes ornières jalonnent le parcours quand ce ne sont pas des portions complètes qui sont parties, laissant la place à une terre constellée de cailloux qui dépassent en tout sens et rendent le trajet chaotique pour n’importe quel type de véhicule. Au programme de la journée, deux belles montées de 600 et 400 mètres de dénivelé suivies d’une belle descente de 800m de dénivelé. Un parcours à priori sympathique mais que l’état de la route promet de corser un peu.

Les endroits où le bitume a cédé sont de terribles nids à poussière que le passage des camions soulève en nuages épais qui vont ensuite recouvrir tous les abords de la route. Nous plaignons franchement les gens qui habitent les villages que nous traversons et qui vivent en permanence dans cette brume. Qui veut du rat ?Nous sommes très rapidement couverts de la tête aux pieds. Comment font-ils pour endurer cela pendant des mois ? La saison des pluies doit finalement être vécue comme un répit.

Les montées se font bien et nous arrivons au point culminant de la 2e vers 1200m. Nous profitons d’un marché pour grignoter quelques beignets avant d’entamer la descente. D’habitude, descente signifie plaisir. Nous n’avons plus à pédaler et il suffit de serrer un peu les freins pour contrôler la vitesse. Mais sur cette fameuse route 13, le plaisir n’est pas au rendez-vous. L’état de la route se dégrade encore et nous sommes en permanence sur les freins pour éviter de prendre trop de vitesse dans les cailloux. Des souvenirs de ripio nous reviennent en mémoire. Les tremblements sont tels par moment qu’une vis de la selle de Laetitia fini par céder et c’est sur une fesse qu’elle atteint le village de Nambak.

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8 responses to “Le Laos, un pays vallonné”

  1. Belle route et beau voyage à vous
    Je vous embrasse
    merci pour les vidéo
    C’est un vrai plaisir d’être sur les routes avec vous malgré les cailloux, la poussière et les difficultés.
    Je vous embrasse
    Merci de prendre le temps de nous raconter votre parcours merveilleux

  2. Vous semblez en pleine forme (surtout après massage) et à l’aise pour tout ce qui comporte la gestion des repas et couchage.
    Bravo encore à vous.
    Bon courage, et c’est un plaisir de vous suivre.
    Les films sont ils pris avec la ”go pro” ?
    à bientôt

    • Merci !
      Les dernières vidéos mises en ligne pour le Laos ne sont pas faites avec la go pro. On peut reconnaître la go pro à ses déformations caractéristiques comme sur les vidéos de baignade ou de toilette dans la rivière au Cambodge.

  3. Passage en Chine refusé aux vélos?
    Dites moi que je ne vais pas me retrouver seule dans 20 jours……

    • Ce sont les seuls dont nous ayons entendu parler. D’habitude, une fois le visa en poche c’est bon (d’ailleurs on les a eu hier !!). On a quand meme prévu de ne pas passer la frontière sur les vélos, histoire de maximiser les chances.

  4. Vous avez parcourus combien de kilomètres depuis le début, en moyenne vous êtes à 100km par jours!!!!!!!
    C’est Brigitte qui va être contente d’ici peu!!!lol
    Sympa le combat de coqs, par contre il y a pas grand chose à manger dessus.
    Vous pouvez rester combien de temps en chine?
    BISOUS

    • On vient de passer la barre des 10000 km. On est trop fier.
      On ferra un peu moins de km avec Brigitte. On a prévu 2 mois et demi en Chine , tout dépend si ça se passe bien. On entend de tout sur la Chine , certains ont adoré , d’autres pas. Donc si ça nous plaît pas, on ira passer plus de temps au Mongolie.

  5. Le Yunnan c’est merveilleux, c’est beau, c’est magique…
    La chine est si belle pour toutes ses ethnies et si grande par sa diversité que vous allez vouloir y rester un an après il y a des côtés obscures et difficiles.
    Je vous embrasse